Les personnes avec des roses.

Philippe Naigeon se leva de son banc, arrangea son uniforme militaire et il étudia la foule qui se déplaçait dans la Gare de Lyon à Paris. Il cherchait la fille que son cœur connaissait, mais dont il ne connaissait pas le visage, ‘la fille à la rose’.

Il avait commencé à s’intéresser à elle treize mois plus tôt dans une bibliothèque à Bordeaux. En prenant un livre sur un rayon, il fut intrigué non par le texte du livre, mais par les notes écrites au crayon dans les marges. L’écriture agréable reflétait une âme réfléchie et un esprit perspicace. Au début du livre, il découvrit le nom du premier propriétaire : Mademoiselle Roselyne Dupuis.

En y mettant le temps et les efforts, il trouva son adresse. Elle vivait à Marseille. Il lui écrivit une lettre pour se présenter et l’invita à correspondre. Malheureusement, le lendemain, il reçut un ordre de convocation pour partir à la guerre en Indochine. Au cours des treize mois suivants, les deux apprirent à se connaître par correspondance. Chaque lettre était une semence tombant dans un cœur fertile. Une histoire d’amour était en train de germer.

Naigeon lui demanda une photographie, mais elle refusa. Elle pensait que s’il s’intéressait vraiment à elle, son apparence n’aurait pas d’importance.

Lorsque le jour arriva enfin pour lui de rentrer en Europe, ils fixèrent leur première rencontre. A 19 heures, Gare de Lyon, Hall central de la Gare. « Tu me reconnaîtras, écrivait-elle, à la rose rouge que je porterai sur le revers de ma veste ». Alors à 19 heures, il était dans la gare cherchant une fille dont il aimait le cœur, mais dont il n’avait jamais vu le visage. Je vais laisser Philippe Naigeon vous raconter ce qui s’est passé.

‘Une jeune femme se dirigeait vers moi grande et mince. Ses cheveux blonds étaient tirés vers l’arrière et bouclés, dégageant ses oreilles délicates. Ses yeux étaient aussi bleus que des fleurs. Ses lèvres et son menton était d’une fermeté agréable. Et, dans son costume vert pâle, elle incarnait le printemps. Je marchais à sa rencontre oubliant complétement qu’elle ne portait pas de rose. Pendant que j’avançais, un petit sourire provocateur se dessina sur ses lèvres.

« Tu viens avec moi marin ? » Murmura-t-elle. Presque malgré moi, je fis un pas de plus vers elle et alors je vis Roselyne Dupuis, une femme de plus de quarante ans, des cheveux grisonnants. Elle était plus que grassouillette. Ses pieds aux chevilles fortes enfoncés dans des chaussures à talon plat. La fille en costume vert s’éloignait rapidement. J’avais l’impression d’être divisé en deux. J’avais un désir ardent de la suivre, mais je désirais profondément la femme dont l’esprit avait réellement accompagné et soutenu le mien. Elle était là. Son visage pâle et grassouillet était doux et sensible. Ses yeux gris avaient une brillance chaleureuse et douce. Je n’ai pas hésité. Mes doigts ont saisi le petit livre usé, à la couverture de cuir bleu qui devait m’identifier. Ce ne serait pas l’amour, mais ce serait quelque chose de précieux, quelque chose de peut-être encore mieux que l’amour. Une amitié pour laquelle j’avais été et je devais toujours être reconnaissant. Je redressais les épaules, fit un salut et montrai le livre à la femme alors bien qu’en parlant, j’étais sous le coup du choc de l’amertume de ma déception.

  • « Je suis le lieutenant Philippe Naigeon et vous Roselyne Dupuis ? Je suis tellement heureux que vous ayez pu m’accueillir. Puis-je vous inviter à dîner ? »

Le visage de la femme esquiva un sourire tolérant.

  • « Je ne comprends pas ce qui se passe » répondit-elle.

Mais la jeune femme qui porte un ensemble vert et qui vient de passer m’a supplié de porter cette rose sur mon manteau. Elle a dit que si vous m’invitiez à dîner je devrais vous dire qu’elle vous attend dans le grand restaurant, de l’autre côté de la rue. Elle a dit que c’était une sorte de test ».

Il n’est pas difficile de comprendre et d’admirer la sagesse de mademoiselle Roselyne Dupuis.

 

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Jean Louis Gaillard
www.www.365histoires.com
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